L’ARCOM, LA LIBERTÉ D’EXPRESSION ET LA SCIENCE

L’ARCOM, LA LIBERTÉ D’EXPRESSION ET LA SCIENCE

Thierry Foucart

Nous avons aujourd’hui deux sciences : la science de Greta Thunberg, jeune suédoise qui a quitté l’école à 15 ans, et qui en est le plus célèbre porte-parole, et celle de John Clauser, beaucoup moins connu, mais prix Nobel de physique en 2022. La science de Greta Thunberg l’emporte largement dans les médias sur celle de John Clauser. Du secrétaire général de l’Onu au président Macron en passant par le pape François, les PDG de Davos et de nombreux députés et journalistes, tous ceux qui comptent dans le monde médiatique se sont agenouillés religieusement devant la vierge Greta, afin de recueillir sa parole et de diffuser la bonne nouvelle. Selon Wikipédia, John Clauser est « un physicien américain connu pour avoir réalisé avec Stuart Freedman la première observation expérimentale d'une violation d'une inégalité de Bell conduisant ainsi à mettre en évidence le phénomène d'intrication quantique. » Passons : le monde médiatique ne s’intéresse pas à la mécanique quantique, malgré le chat de Schrödinger, dont personne ne peut savoir s’il est vivant ou mort. Le mien est bien vivant, c’est le principal.

Le moment arrive où citer la science de Clauser devient un délit. En juin 2024, le conseil de l’Arcom a mis en garde Sud-Radio pour avoir laissé un professeur de physique de l’université de Tours tenir à l’antenne des propos « venant à contredire ou minimiser le consensus scientifique existant sur le changement climatique ». Pour la même raison, CNews a été condamnée à une amende de 20 000 € : « dans l'émission Punchline été, en août 2023, un invité [le même professeur] a contesté l’existence d’un réchauffement climatique dû aux activités humaines, le qualifiant de “mensonge” et d’“escroquerie”, imputable à un “complot” destiné à justifier l’intervention de l’État, sans provoquer la moindre réaction sur le plateau. Ce qui n'a pas été respecté : obligation de présentation honnête des questions prêtant à controverse, obligation de maîtrise de l’antenne » (Le Monde ¹). Par suite, si la chaîne CNews invite John Clauser, qui considère la théorie du GIEC comme « une dangereuse corruption de la science qui menace l’économie mondiale et le bien-être de milliards de personnes » ², elle devra prévoir la présence d’une personnalité d’un niveau scientifique équivalent, comme Greta Thunberg, pour que le professeur Clauser puisse être contredit de façon crédible. Sinon, il risque de se voir retirer le prix Nobel.

Inversement, sur France Info, les “réchauffistes” peuvent qualifier les “climatosceptiques” de complotistes sans contradicteur ³. Cette différence de traitement entre les théories climatiques est significative d’un jugement de l’Arcom qui n’a aucune compétence sur ce point (le consensus auquel elle se réfère n’est pas un critère de scientificité).

Il existe maintenant dans les universités des référents “parité sexuelle”, “anti discrimination”, “laïcité”, “inclusion”, etc. chargés de contrôler le respect des “règles morales”. Celle de Tours a suivi l’avis de son référent “honnêteté intellectuelle” en retirant l’éméritat à ce professeur médaillé du CNRS. Il est indigne d’une université de s’ériger en juge en moralité.

Cette tendance montre la tentation de généraliser la loi Gayssot, en élargissant l’interdiction de la contestation des génocides et crimes contre l’humanité à la théorie du réchauffement climatique et plus généralement à toutes les théories scientifiques approuvées par la loi. Il faudrait alors accepter que p soit égal à 3,2, puisque c’est la valeur que lui a donnée une loi votée par le Sénat de l’Indiana en 1897.