Brexit. Est-il possible de changer l’Europe ? Et pour quelle Europe ?
Le Brexit a traduit le sentiment des Anglais sur l’Union Européenne telle qu’elle fonctionne actuellement. Est-il possible de changer l’Europe ? Et pour quelle Europe ? Cette question n’a jamais reçu de réponse depuis 1946, l’ambiguïté n’a cessé de régner et sur les institutions et sur les intentions.
Les options entre lesquelles le choix n’a pas été fait sont :
entre une Europe espace et une Europe pouvoir : zone de libre circulation et de concurrence ouverte, ou gouvernement jacobin se substituant aux souverainetés nationales ?
entre une Europe de la paix et de la chrétienté et une Europe fonctionnelle créant un modèle économique et social unique ;
entre une Europe marchande régie par les prix et la libre concurrence ou une Europe dirigiste menant des politiques commerciales, fiscales, sociales, financières ?
entre une Europe forteresse contre le reste du monde ou une Europe sans rivages éliminant les obstacles à la concurrence interne et externe ?
entre une Europe des Etats, pilotée par la classe politique, ou une Europe des Européens, libérés de l’esclavage dans lequel ils sont tenus par leurs gouvernements ?
Au fond, les institutions européennes vont-elles naître d’un ordre créé par des « constructeurs » ou d’un ordre spontané issu de l’expérience de la vie en commun ?
Jusqu’au traité de Rome (1957) le non-choix est visible. D’une part, suivant la doctrine de Jean Monnet, on crée un ensemble de monopoles publics et centralisés, dont la CECA est le meilleur exemple. D’autre part les « pères fondateurs » (Adenauer, de Gasperi et Schuman) veulent rapprocher les peuples en recherchant ce qu’ils ont en commun : les racines chrétiennes (les 12 étoiles de Marie), le besoin de reconstruire, d’échanger et de circuler.
Le traité de Rome créant la CEE est celui du non-choix. D’une part la suppression des tarifs douaniers internes et la réduction des tarifs extérieurs communs, d’autre part la « préférence communautaire » et les politiques communes, dont la célèbre PAC, arrachée par la France.
Avec le premier élargissement et l’entrée des Anglais dans la CEE (1973) un virage va être pris dans la direction de l’ouverture. Margaret Thatcher, premier ministre en 1976, obtient la signature de l’Acte Unique (1985, ratifié en 1986) qui adopte le principe de la mutuelle reconnaissance des normes, instaurant ainsi une véritable concurrence institutionnelle.
Les constructivistes prennent une revanche éclatante avec Jacques Delors et le traité de Maastricht (1992) qui introduit l’Union Monétaire, créant l’euro et la Banque Centrale Européenne. Dès lors, la course au dirigisme va s’accélérer. Le droit européen prend son essor et les directives de Bruxelles viennent grossir les législations nationales. La concurrence institutionnelle passe pour « dommageable », parce qu’elle créerait le dumping : fiscal, social, environnemental. Avec les traités de Nice et de Lisbonne, le véritable organe de décision devient le « Conseil de l’Union Monétaire » (on dit « Conseil »), il oriente les différents « Conseils des Ministres » L’Europe est devenue l’affaire des Etats.
Toutes ces contradictions internes de l’Europe se sont accentuées avec deux phénomènes : la mondialisation et l’élargissement de l’Union.
La mondialisation met les Etats en concurrence. Elle avantage les institutions plus productives : fiscalité allégée, réglementation plus souple, secteur public limité. Les étatistes
vont donc « harmoniser », c'est-à-dire détruire la diversité européenne et la compétitivité. L’Europe « forteresse » veut résister aux assauts des Etats Unis et des pays émergents. Aux Etats Providence va se substituer une Europe Providence.
L’élargissement de l’Union aurait pu contrarier cette évolution, les peuples libérés du communisme ayant peu de sympathie pour la planification et la bureaucratie. Mais il y avait aussi les mirages de l’Europe Providence, avec ses crédits et subventions. Progressivement la concurrence de ces pays à bas salaires et faibles réglementations sera neutralisée au prétexte de dumping : plombiers polonais et routiers bulgares seront mis an pas.
Finalement, la question « Quelle Europe ?» se ramène en fait à un choix : socialisme ou libéralisme ? Les Français se verront-ils offrir un choix plus clair que celui proposé aux Anglais ? Rejeter l’Europe de Bruxelles est nécessaire, mais libérer l’Europe est le seul espoir de renaissance et d’harmonie.
Jacques Garello
Tout ce que vous avez voulu savoir sur l'Europe sans oser le demander : conférence de
M. Jacques Garello lors du Weekend de la Liberté du 23 au 25 septembre 2016
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